Jean Geiler de Kaysersberg
Né le 16 mars 1446 à Schaffhouse, le jeune Geiler n’y resta guère. L’année même de sa naissance, son père s’établit à Ammerschwihr comme secrétaire de la municipalité, fonctions qu’il n’exerça que peu de temps : un ours le blessa mortellement. Jean fut alors recueilli par son grand-père à Kaysersberg. Après de brillantes études à l’université de Fribourg-en-Brisgau il commença d’y enseigner, puis entreprit en 1471 des études de théologie à Bâle. Docteur frais émoulu, il fut rappelé à Fribourg pour y enseigner les Saintes Écritures en 1476 et y devint le recteur de l’université. Alors que sa carrière s’annonçait brillante, il quitta sa chaire de professeur pour devenir prédicateur. Invité par l’évêque de Wurzbourg à prêcher dans sa ville, il fut heureusement retenu par Pierre Schott en Alsace et prit ses fonctions de prédicateur de la cathédrale de Strasbourg dès 1478. Il prêchait tous les jours pendant le Carême, tous les dimanches, lors des fêtes carillonnées et lorsqu’une grande procession se déroulait. S’ajoutaient à ces prestations obligatoires les sermons que Geiler acceptait de donner dans plusieurs monastères féminins. On estime qu’il prenait la parole en moyenne deux fois par semaine. Fidèle disciple de Gerson, Geiler attendait beaucoup de l’évêque de Strasbourg qui devait, selon lui, réunir les prêtres en synode auprès de lui, leur rendre visite dans leurs paroisses et les traiter comme de véritables coopérateurs. Déçu par l’inertie des titulaires successifs de cette charge, il envisagea sérieusement de se retirer dans un ermitage : « Il n’y a pas d’espoir de voir la chrétienté s’améliorer, déclare-t-il en 1508 du haut de sa chaire… une réforme générale ne peut donc se faire… Que chacun aille donc dans un coin, enfonce sa tête dans un trou et s’occupe à obéir, lui, aux commandements de Dieu. » Jean Geiler mourut à Strasbourg le 10 mars 1510, sept ans avant le début de la Réformation. Certains protestants le considérant comme leur précurseur, le Saint-Siège jugea que la lecture ses sermons était dangereuse et le mit à l’index. Vite oublié par les protestants, il ne fut redécouvert qu’au XIXe siècle. Ainsi réveillé, l’intérêt suscité par cette grande figure est resté vif jusqu’à nos jours.