Une anthropologie personnaliste du don

Est-il encore possible – et au fond est-il bien raisonnable – d’oser envisager aujourd’hui l’élaboration d’une anthropologie centrée sur le don, compris comme structure fondamentale de la personne ? Renonçant à se prendre pour sa propre origine, la personne se comprend elle-même comme le fruit d’un don. Elle se reçoit de sa relation à une altérité première, advient à elle-même en s’appropriant ce qui lui est donné d’être et s’accomplit enfi n en se donnant librement elle-même. Telle est la loi ternaire du don qui régit la vie personnelle.
La Trinité comme mystère de pure donation révèle la source de ce rythme ternaire : le Père, origine de toute donation, le Fils, pure réceptivité et offrande, l’Esprit, don de l’intimité partagée du Père et du Fils. Elle constitue le modèle analogique de toute communion des personnes, comme l’enseigne le concile Vatican II. En effet, l’analogie trinitaire de la famille donne à penser le don de la vie dans le don mutuel des époux, selon une fécondité analogue à la spiration de l’Esprit au sein de la Trinité. Une telle « théo-logique » de la vie personnelle, conjugale et familiale parvient-elle à lever le soupçon contemporain sur l’anthropologie du don ? Une telle anthropologie du don, en sa structure ternaire et sa source trinitaire, est-elle en mesure de fonder une authentique éthique familiale, à la hauteur des enjeux contemporains ?
François de Muizon est marié, père de quatre enfants, membre de la communauté du Chemin Neuf, et docteur en philosophie et en théologie. Il enseigne la théologie morale, l’anthropologie théologique et l’éthique sexuelle, conjugale et familiale à l’Université catholique de l’Ouest. Ses recherches portent sur l’identité sexuée, l’anthropologie personnaliste du don, le mariage et la théologie du corps qu’il enseigne aussi à l’Institut de théologie du corps.